Après un vote rapide des article 10 à 12, le gros morceau de la soirée arrive. Il s'agit de certains amendements après l'article 12, connus sous le triste pseudonyme d'amendements Vivendi-Universal. Il y en a au total quatre, mais les amendements 247 et 151 sont rapidement abandonnés, car jugés excessifs. Le 320 et lui abandonné car identique à celui qui va être discuté. L'élu à la discussion est donc au final le 150 deuxième rectification. En outre, un ensemble de sous-amendements sont proposés pour limiter les dégats du 150.

Présentation des sous-amendements

M. Bloche, qui propose le sous-amendement 376 prend immédiatement un ton très grave dès qu'il a la parole, demandant aux députés d'être très attentifs. Il n'hésite pas à prouve le bien-fondé du surnom de l'amendement en citant le contenu d'une interview du PDG de vivendi, paru le jour-même. Ce dernier avoue ouvertement être très favorable à l'amendement. M. Bloche explique que c'est parce que l'amendement, sous une apparence respectable, est une véritable machine de guerre contre le Logiciel Libre. i notre assemblée vote l'amendement qui vient d'être présenté de manière anodine et lapidaire, nous tuons le logiciel libre dans notre pays.. Il explique que la France étant pionnière dans ce domaine, refuser l'amendement ou le sous-amender serait du patriotisme économique, ni plus, ni moins. Il est le premier d'une longue liste de député à expliquer qu'il fait réprimer l'outil et non le crime.

M. Paul présente ensuite le sous-amendement 324, qui va dans le même esprit parle lui de gros risque et rapelle que le P2P n'est pas le diable, mais un enjeu considérable pour le net avec par exemple le partage de contenus légaux ou l'optimisation de la bande passante. Il l'affirme haut et forr : le P2P est cosubstanciel de l'internet. Il dit non au confusion : Site/logiciel, outil/usage et déclare : Se battre contre le peer to peer (...), c'est vraiment se battre contre l'internet. Veut-on un réseau où chaque échange est tracé, contrôlé, analysé, ou veut-on un réseau libre et ouvert ?.

Les sous-amendements 363 et 364 ont le même but, mais avec, il faut bien le dire, une formulation bien plus floue techniquement, ce qui ne sera pas sans conséquence comme on le verra. Le but est définir l'usage et non l'outil, mais est-ce une réussite ? L'avis du Rapporteur tombe comme le couperet de la guillotine : défavorable aux 376 et 324, favorable au 363 et 364. sans surprise, le Ministre pense la même chose.

Les débats sur les sous-amendements

M. Dutoit commence avec une tentative de mise au point : les droits d'auteurs sont un prétexte dans ce projet de loi, un cheval de troie pour le vrai objectif. Que nous est-il en effet proposé de ratifier, sinon le principe selon lequel tout logiciel de communication ne comportant pas de MTP serait illégal ? Pour lui, la loi est bien trop floue et pourrrait interdire tout logiciel sous-tendant l'infrastructure du net. Après une éniéme analogie outil/usage, il conclut en affirmant que l'amendement étant trop dangereux pour le Logciel Libre, on ne peut que le repousser avec vigueur.

M. Paul reprend la parole, demandant une suspension de séance pour expliquer à tous les enjeux et les conséquence de dispositions engageant l'avenir de la création et de l'innovation sur internet pour des années.

Mme Billard se dit elle effondrée, ne pouvant croire à un avis favorable du Ministre. Je ne pouvais pas imaginer qu'on irait aussi loin dans l'interdiction des logiciels libres, mais sans doute étais-je naïve. Une démocratie ne peut bloquer qu'a posteriori. S'il est adopté, aujourd'hui sera vraiment un jour noir pour eux (Les Logiciels Libres).

M. Carayon défent rapidement ses deux sous-amendements comme étant équilibrés. M. Bloche reprend la parole pour rapelle que le P2P est une puissante architecture échange contenus et information dans le monde. La France est en outre douée en Logiciel Libre (il cite VLC) et on ne peut se permettre de causer une fuite des cerveaux. M. Carayon perd un peu de son sang froid en réaffirmant que ses sous-amendements écarte tout les risques dont parle l'opposition. M. Paul explique encore une fois que pour eux, le 364 ne protége pas assez, car trop flou.

M. le Ministre s'époumonne alors dans une analyse de texte destiné à prouver que la loi n'est pas flou et que l'opposition ne fait qu'agiter des épouvantails (en langage d'internaute, on dirait du FUD).

M. Dionis du séjour défend ensuite le Logiciel Libre comme une voie d'avenir et déclare ne pas vouloir voter le 150. Les débats font encore rage au sein de la communauté (il cite les propos de Linus Thorvald sur les DRM) et donc trop tôt pour légiférer. Il souligne aussi la difficulté de trouver l'éditeur d'un Logiciel Libre, de par sa nature. M. Cazenave , citant Bittorrent, désire prouver que le P2P peut sans problème inclure des filtres, ce qui est un peu trop optimiste pour quiconque a pu tester ces filtres passoires[1]. Il déclare encore une fois que le 364 n'est pas flou du tout.

Aucun n'internaute n'est cependant dupe. Le 150 et le 364 sont trop flous, et de plus, contradictoires entre eux. M. Bayrou souligen d'aillleurs cette contradiction.

La suspension de séance demandée a lieu, puis M. Bloche, Mme Boutin et M. Paul prennent brièvement la parole pour dire une enième foi que tout ceci est trop flou et innaplicable.

M. le Rapporteur, s'improvisant historien judiciaire, déclare la jurisprudence Sony Betamax comme du passé et celle Grokster comme du Futur. On verra bien dans 10 ans... Onse demande bien ce qu'il entend par Il s'agit donc de légaliser le partage de fichiers ! quand on voit les textes qu'il défend. M. le Ministre reparle de point d'équilibre[2] Il déclare vouloir poursuivre pénalement ceux qui nourrissent intentionnellement le piratage par des messages publicitaires - c'est-à-dire ceux qui font de l'argent sur le dos des internautes et des créateurs., et fait une étrange distinction entre logiciel libre et logiciel de piratage.

Les ultimes intervenants n'ont droit qu'à deux minutes chacun. M. Bayrou promet des juges perplexes devant une telle ambiguité. M. Cazenave déclare qu'aucun logiciel français ne pourra être visé, mais que des sites étrangers (donc hors juridiction ??). M. Wauquiez se déclare contre le 324 de M. Paul car contredisant le principe de la technologie neutre. M. Bloche joue les tatillon sur l'absence du mot intentionellement, présent dans la bouche du minstre mais pas dans le texte. M. Richard répond en expliquant que ce terme est inclut dans la définition d'une infraction pénale, et donc inutile dans le texte de loi. Mme Billard finit la danse avec une énième explication sur le flou de la loi, créant une dangereuse incertitude juridique.

Vote et conclusion

Le vote est effectué, et, sans surprise, seuls les 150, 363 et 364 sont votés. Nous voilà donc avec une loi bien étrange, extrêmement floue et contradictoire.

Sans être un grand génie on peut prédire que cet amendement aura un effet nul sur les echanges illégaux de fichiers en France et dans le monde. Le Logiciel Libre ne sera pas menacé dans sa globalité, mais il crée une grave incertitude juridique pour les PME du libre. De même que les brevets logiciels, un telle texte fait planer sur eux l'ombre permanente d'un procès par un plus gros éditeur, pouvant les ruiner même s'ils obtiennent gain de cause. Nul doute que beaucoup préfèreront s'exiler que prendre de telles risques. Au final, une loi absurde et dangereuse ne répondant nullement à ces objectifs.

Notes

[1] Tentez donc une recherche, sur, au hasard, Terminator, sur le moteur de recherche officiel de Bittorrent

[2] Son point déquilbre est semble-t-il étrange, plus proche de point L1, L2 ou L3 ou que L4 ou L5. Que ceux qui ne comprennent pas cherchent la définition de Point de Lagrange.