Chroniques de l'hyperespace

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mercredi, mars 15 2006

DADVSI - Séance du Mardi 14, Soir

Interopérabilité, suite et fin

Avec l'amendement 138, M. Dionis du Séjour désire inscrire dans la loi l'obligation d'informer le consommateur des DRM inclus et des restrictions qu'ils imposent, sur chaque produit culturel. M. le Ministre lui préfère son propre amendement 31, qui concerne l'article 8. C'est l'occasion de phrase mémorable de M. Dutoit qui propose de mettre le même genre de message que ceux qui existent sur les cigarettes : Copie impossible, Ce CD peut nuire à la santé de votre ordinateur, Contient des logiciels espions. M. Paul n'est pas en reste avec Le DRM tue !. Il exhorte le parlement à ne pas se contenter d'une interopérabilité de parole. Le DRM pas compatible avec interopérabilité, ils le savent et le disent, mais ne sont pas écoutés et, sans surprise hélas, l'amendement n'est pas adopté.

C'est M. Paul qui défend l'amendement 86 rectifié. Le président de l'assemblée lui propose, dans une formulation fort maladroite et peu diplomatique de défendre l'amendement de M. Bloche en un mot. Mais M. le Ministre préfère régler tous les conflits entre consommateurs et DRM par un collège de médiateur, sans voie judiciaire. Avec 9 voix pour et 35 contre, il n'est pas adopté.

On parle ensuite de l'amendement 233, 3ème rectification, qui vise à obliger par la loi les fournisseurs de DRM à assurer l'interopérabilité, en qualifiant son manque de vice-caché. M. Suguenot rappelle l'illégalité des CD Copy-Control, déjà dénoncé par M. Mathus dans l'après-midi. Trois sous-amendements, le 400, le 402et le 404, sont également discutés. Tout le monde est d'accord pour cette fameuse interopérabilité, mais les débats font rage pour savoir si les article, amendements et sous-amendements suffisent à la protéger par la loi. Pour Mme Billard, il est incompréhensible que la loi dise que l'interopérabilité est un droit tant qu'elle ne porte pas atteinte aux conditions d'utilisation d'une œuvre. Comment une telle atteinte peut-elle exister. Après un imbroglio procédurier sur les raisons du refus d'un sous-amendement de M. Dionis du Séjour par le président, on passe au vote. Le 402 et le 402 ne sont pas adoptés. Le 404 et le 233 et bien sur l'article 7 oui.

Le respect de la vie privée

Le débat sur l'amendement 273 commence sur les chapeaux de roues avec l'exemple du célèbre rootkit de Sony, présenté par M. Carayon. Il expose que les MTP sont une source de danger, en particulier pour les ordinateurs et réseaux des domaines sensibles. L'amendement vise à imposer la fourniture de leurs codes sources aux services de l'Êtat. M. Paul informe alors que M. Wauquiez a affirmé que cet amendement permettrait de déplomber de leurs DRM les MP3 des services commerciaux, ce que ce dernier conteste. Mais M. Paul veut surtout souligner les erreurs techniques de M. Wauquiez qui pense que les MP3 peuvent être DRMisé. Il commence ainsi sans le vouloir un long débat secondaire qui va se faufiler tout au long des discussions.

Après cet interlude, il commence à défendre le sous-amendement 403, soulignant que si le gouvernement admet que les DRM peuvent être dangereux pour les ordinateurs, il n'est pas démocratique de les imposer aux citoyens. M. le Rapporteur et M. le Ministre, probablement aveuglés, nient cette contradiction.

M. Wauquiez dit alors de belles bêtises, en tentant de répondre à M. Paul : Dans une version accessible à tous, d'abord : quand vous téléchargez un fichier MP3 sur iTunes et que vous essayez de le lire sur autre chose que votre iPod, vous pouvez avoir des problèmes. Dans une version plus technique : les fichiers MP3 sont des fichiers de compression et peuvent donc comporter des MTP. Ce qui vaut une très forte réaction sur les forums, de nombreux internautes, dont moi-même, s'inquiétant de tant d'approximations techniques.

Pour défendre le 403, Mme Billard continue avec un discours sur la sécurité des gens et M. Bloche parle ensuite du choc entre DRM et vie privé. M. Bayrou, dans un discours très imagé, explique que le but de l'amendement est noble, mais que les méthodes, une usine à gaz avec des pseudopodes pour vérifier les codes sources sont d'une efficacité douteuse. M. Cazenave souligne une fois encore l'incohérence du projet qui refuse de protéger les citoyens contre les dangers reconnus des DRM. Le cas australien est ainsi cité une nouvelle fois.

M. Paul, parle d'un amendement cosmétique, puis répond aux affirmations de M. Wauquiez sur iTunes en expliquant (avec encore des approximiaton...) que ce ne sont pas des MP3 (technologie franco-allemande) mais des fichiers protégés par une technologie américaine, Fair-Play. En définitive, vous avez fait la promotion de Boeing contre Airbus, et je le déplore. M. Bayrou demande l'interdiction pure et simple de tout DRM dangereux (et donc de tout DRM, ce qu'il se garde de dire explicitement...). M. Wauquiez, citant les pseudos de plusieurs internautes de Framasoft pour leur répondre, dont le mien, explique ensuite la différence entre format de compression et format de DRM, et clarifie enfin le problème. Fin de cet étonnant débat sur des points éminemment techniques[1].

Au final, l'amendement 273 est adopté sans son sous-amendement 403. Une protection contre les DRM à deux vitesses en quelque chose.

Le Droit à la copie privée

Le droit à la copie privée est désormais à l'ordre du jour, et on peut qu'être intrigués devant les arguments pour sa limitation : ne pas pénaliser la chronologie des médias, interdire celle du DVD car on ne peut le faire en nombre limité[2]. Les DRM sont au centre du débat : dangereuses pour M. Bloche, la réponse appropriée aux piratages selon M. Dionis du Séjour, incompatibles avec la copie privée selon M. Dutoit... L'aspect indispensable du droit à la copie privée, et de la taxe la compensant est cependant rapellé par MM Mathus et Migaud. Mme billard souligne elle la complexification croissante de tout le système, qui devient inquiétante. Quelle nébuleuse !

Le droit à la copie privée, tout le monde le désire, mais le gouvernement désire fortement que celui-ci reste subordonné au droit d'auteur et soit appelé en conséquence le bénéfice de l'exception pour copie privée puis le le droit à l'exception pour copie privée. Sous la pression, M. Wauquiez retire son sous-amendement 321, à la grande déception de M. Dutoit.

Le sujet est donc désormais l'amendement 258 rectifié et ses sous-amendements sous-amendement 270 et sous-amendement 271, tous deux très proches. Ils instituent le droit à l'exception pour copie privée et sont vite adoptés. C'est bien, mais assez frileux, pas assez suffisant pour beaucoup.

Une surprise attend les internautes avec l'adoption de l'amendement 6, protégeant le droit d'enregistrer toute émission télévisée, quelque soit la chaîne. Certains ironisent sur les forums, suggérant que cet amendement soit passé parce que M. Le Ministre sait se servir d'un magnétoscope, à défaut de savoir se servir du net. Et on se demande comment cette loi pourra être appliquée avec l'arrivée de HDCP.

Parallèlement, de nombreux parlementaires posent une question qui gène : pourquoi l'amendement 30 rectifié a-t-il été supprimé en catimini, de même que le 321, abandonné pour ne pas déplaire à la Cour de Cassation. Énième débat sur la procédure, qui finit par un lever de séance, en raison de l'heure tardive

Compte-Rendu Analytique

Notes

[1] Cet étrange débat aura eu pour mérite de montrer que les approximations techniques sont hélas inévitables, et que M. Wauquiez, ou son équipe, suivait avec intérêt les débats sur Framasoft. Voilà au moins un député qui sait reconnaître ses erreurs et venir parler avec les internautes.

[2] Il me semble pourtant que c'est la même chose avec un CD audio, dans la pratique...

DADVSI - Mardi Après-Midi

Le début de la séance est la suite directe de la séance de jeudi dernier. Plusieurs amendements et sous-amendements (185, rectifié, 183, 187, 94 rectifié et 184) sont votés et rejetés, hélas sans surprise, puisque le gouvernement est contre : ils sont trop proches de la LGO.

La taxe sur la copie privée

La suite des débats, portent sur la taxe sur la copie privée, à travers les amendements 96 réctifié, 97, 188, 98, .

Très vite, avec le 96 rectifié, on parle de la légitimité de la taxe dans un mode ou les DRM interdisent la copie privée. On note M. Cazenave qui se résoud aux MTP, mais promet de défendre interopérabilité et Logiciels Libres ainsi que M. Suguenot qui cite Louis Bertignac et sa http://www.bertignac.com/solution. On s'écharpe aussi sur l'évolution de son montant passé et public, ainsi que sur la survie du spectacle vivant qui l'utilise. Est-ce que ça baisse où ça monte ? Il y aussi la question de sa répartition qui n'est pas simple il faut dire. M. le Ministre de son coté, continue ses désormais célèbres discours noyant le poisson et insistant sans cesse sur ces accords avec l'industrie[1]. Le 96 rectifié est rejeté (scrutin public, 25 pour et 33 contre).

Le 97 et le 188 proposent des solutions, dont la taxation des FAI. Cette dernière est qualifiée de film d'horreur expressionniste par le rapporteur. Chaque camp traite l'autre de passéiste. M. Ayrault cite un article du Monde, très critique sur les positions du gouvernement. On propose 1001 taxes, au point d'en être ridicule, ce qui est souligné. On note l'excellente analyse de M. Bayrou : Certains, un peu naïvement sans doute, imaginent qu'en étendant à l'infini des mesures de protection prétendument inviolables, on pourra un jour verrouiller tout échange de copies privées via une surveillance de tous les instants des communications des internautes. Pour nous, cela ne correspond à rien de réalisable.... Il ajoute que l'Urgence décrété sur la loi empêche d'explorer toutes les voies possibles d'évolution de la taxe. M. Mathus continue dans la même veine, soulignant l'illégalité des CD Copy-Control et l'immobilisme du gouvernement à ce sujet. M. Richard souligne la resemblance de cette taxe sur les FAI avec la Licence Globale. Amendements rejetés...

Le 98 est l'occasion pour M. Paul de parler du mail d'un internaute interrogeant le parlement sur la justesse du nombre de 5 copies par oeuvre quand la durée des droit d'auteurs peut atteindre 130 ans. Mme Billard souligen elle l'incohérence entre la taxe sur les DVD vierges et l'interdiction de copie privée de ses même DVD. Enième amendement rejeté.

Les amendements 95 rectifié et 186 sont eux l'occasion de parler encore du téléchargement. M. Suguenot défend l'idée que le téléchargement n'est pas de la piraterie. Pour M. le Rapporteur, en revanche, le choc des deux logiques en présence ne peut se résoudre par un compromis. C'est toute sa logique, ou rien ! M. le Ministre répond à la question des DVD vierges en expliquant qu'ils peuvent servir à la enregistrer la télévision. Mme Boutin ne comprends pas et M. le Ministre l'ignore alors. Rejeté.

L'amendement 24 est le premier adopté du jour, normal, il est de M. Vanneste.

Le 99 rectifié est l'occasion pour M. Mathus de citer le cas australien, montrant le besoin d'une loi souple aux antipodes de la loi très répressive qu'est DADVSI. M. le Rapporteur nie, critique et prétend que la Licence Globale (qui n'est pourtant pas le sujet du moment) est une rémunération non individualisée. M Paul le contredit immédiatement et rappelle les députés à la modestie : Personne n'est ici un gourou de l'internet Il fustige l'idée de contrôle à distance caché derrière les DRM. Mme Billard, elle, parle d'un Statu quo de 3 ans, totalement stupide. M. Bloche, ensuite, parle d'un usage excessif des DRM et conclut par ces mots : Nous vous proposons tout simplement un droit d'auteur durable ! Le scrutin est public : 82 votants, 27 pour, 55 contre. Rejeté.

On finit la taxe sur la copie privée, avec les amendements 176 et 177, proposant d'exempter les professions medicales de la taxe. Après de longues discussions sur le bien-fondé de telles exceptions pour certaines prefessions, c'est le 177 seul qui est adopté.

Les Mesures Techniques de Protection face à l'interopérabilité

On est ici dans l'article 7. M. Dionis du Séjour commence la danse en déclarant que les MTP sont certes légitimes, mais quer l'on doit faire passer l'interopérabilité avant tout. C'est la raison de l'amendement 137 du groupe UDF. Sans surprise, M. le Rapporteur est contre, arguant de problème de double emploi avec l'amendement 253 et de rédaction.

M. Dutoit fustige les propos du rapporteur : non, les DRM ne sont pas un progrès pour l'humanité. La totalité de ceux-ci ne visent qu'a controler les usages privés, en bafouant la présomption d'innocence. M. Paul iniste lui aussi sur les droits des usagers et demande au gouvernement sa definition de l'interopérabilité. M. Cazenave demande une explication des DRM pour dépasser la sémantique barbare. C'est M. Suguenot qui la lui fournit, expliquant comment marche une plateforme comme Virgin ou la FNAC, l'importance de Microsoft dans celles-ci. Il montre aussi que le problème d'interopérabilité exite même sans DRM, avec le cas Word/OpenOffice.org. Mme Boutin continue, soulignant que les DRM logiciel, encore plus les DRM matériels, feront le jeu économique d'autre pays.

M. Carayon intervient alors avec un amendement 273 2ème rectification, qualifié de consensuel, permettant aux logiciels libres de s'émanciper de la gangue dans laquelle ils étaient en quelque sorte enfermés et plus de choix pour les utilisateurs, citant la dimension affective qui peut lier un utilisateur à son logiciel. Mme Billard approuve, rappellant que les DRM ne sont pas définis ni cités par la directive européenne. Elle continue sur les problèmes de sécurité, d'interopérabilité et de pérennité posés par les DRM. Pour elle, Le format ouvert doit être obligatoire, sinon, nous connaîtrons à nouveau des situations comme celle d'aujourd'hui où Microsoft refuse de respecter les obligations auxquelles Bruxelles lui demande de se soumettre

M. Bloche affirme son approbation de ces propos, puis M. le Ministre répete encore une fois son discours : Les MTP comportent un aspect positif pour le consommateur en favorisant notamment une grande diversité de l'offre. On se demande bien pourquoi... L'amendement 137 est voté et hélas rejeté.

Le compte-rendu analytique

Notes

[1] À croire que ces accords comptent pour lui plus que la loi, que le parlement n'a plus de rôle à jouer.